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Histoire de la corrida (source Wikipédia)

 

La corrida est une forme de course de taureaux consistant en un combat entre un homme et un taureau, à l'issue duquel ce dernier est mis à mort ou, exceptionnellement, gracié (indulto). Elle est pratiquée en Espagne, au Portugal, dans le Midi de la France et dans certains États d'Amérique latine (Mexique, Pérou, Colombie, Vénézuela, Equateur et Bolivie).

Se déroulant dans des arènes, la corrida est issue d'une longue tradition puisque sa forme actuelle, où la mise à mort est effectuée par le matador, à pied et armé de sa seule épée, remonte à Francisco Romero, dans la première moitié du XVIIIéme siècle. Elle se déroule selon un rituel et des modalités bien fixés, dont l'essentiel remonte à ceux définis par le matador Francisco Montes "Paquiro", avec son traité de tauromachie de 1836.

 

Considérée par les aficionados et nombre d'historiens comme un art, la corrida a inspiré de nombreux créateurs aussi bien en peinture, qu'en littérature, musique et au cinéma. En France, alternativement interdite et autorisée par les lois, elle est depuis 1951 légalement autorisée sur les parties du territoire où elle constitue une tradition ininterrompue, principalement le midi de la France. En janvier 2011 la tauromachie est inscrite à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel en France par le ministère de la Culture.

 

Dans le langage courant, la corrida désigne de nos jours la course de taureaux telle qu'elle se pratique principalement en Espagne, au Portugal, en France et dans certains pays d'Amérique latine. Cependant, avant d'exister sous leur forme actuelle, les courses de taureaux ont connu en Espagne une longue histoire étalée sur de nombreux siècles.

Bien que les jeux taurins et le culte du taureau aient eu une grande importance dans l'antiquité dans tous les pays du bassin méditerranéen1, il semble difficile de lier leur existence avec les pratiques de la corrida espagnole d'après les études de la plupart des historiens contemporains. Le culte du taureau a existé dans les civilisations méditerranéennes et bien au delà, sous des formes particulières à chacune de ces cultures. Il y eut parfois influences dans les pratiques, mais héritage, non. La corrida est d'autant plus espagnole qu'elle est l'oeuvre lente d'un peuple et de ses gouvernants.

L'origine romaine de la tauromachie est fréquemment réfutée par les historiens, et ce dès le XVIIIème siècle par un des premiers chroniqueurs Nicolás Fernández de Moratín.

Les origines de la corrida et son déroulement restent opaques. Il faut se résigner à l'incertitude. Nous ignorons les origines exactes des jeux tauromachiques dont l'épanouissement fut réservé à l'Espagne. Bien qu'on ne puisse le prouver d'aucune manière, grande est la tentation de croire que la tauromachie espagnole est née tout simplement en Espagne. La présence de nombreux aurochs y est attestée depuis des millénaires. Les peintures rupestres ont valeur de documents irréfutables, peintures magdalénienne des grottes d'Altamira, peintures néolithiques de Albarracín. Les fresques d'Altamira et d'Albarracín sont également citées par Robert Bérard pour souligner la complexité des liens entre culte du taureau et tauromachie, et aussi entre dieu-taureau et taureau de combat.

D'autres historiens comme Véronique Flanet et Pierre Veilletet soulignent encore la difficulté à dater précisément l'apparition de la corrida dans l'histoire. Les premières courses de taureaux dont on ait connaissance datent des fêtes royales données Alphonse II des Asturies en l'an 815. On n'en sait pas plus. Il faut attendre le XIIIème siècle pour en savoir davantage du combat lui-même. En revanche, des légendes, des miracles, laissent penser que la tradition tauromachique est déjà bien implantée dans les contrées les plus reculées de la péninsule Ibérique, tant chez la noblesse qu'auprès du peuple.

 

Evolution

 

Au Moyen Âge, les nobles organisent entre eux des chasses aux taureaux et des joutes équestres pendant lesquelles ils attaquaient le taureau à l’aide d’une lance. Ainsi, selon une chronique de 1124, des "fêtes de taureaux" ont lieu à Saldaña alors que Alphonse VII s'y trouve. La chronique rappelle également que Le Cid est lui-même friand de ces jeux.

Au XIIème siècle, le succès d'une fête royale repose essentiellement sur un personnage inconnu dans les provinces du sud de la péninsule, le mata-toros, qui tue vraisemblablement l'animal d'un jet de javelot.

Plus tard, Charles Quint sera grand amateur de ce spectacle lorsqu'il se présente sous forme de joutes équestres, c'est-à-dire des "jeux de toros" répondant à des codes précis, dont l'habileté des cavaliers est rapportée par de nombreux traités.

Au cours des XVIème et XVIIème siècles, la tauromachie à cheval réservée à la noblesse se codifie peu à peu. Les cavaliers pratiquent un combat à l’aide de lances (ancêtre de la corrida de rejón et de la corrida portugaise), et dès le début du XVIème siècle, la tauromachie à cheval de la noblesse commence à se codifier. Les traités de tauromachie équestre abondent à partir du XVIème siècle: "Libro de la montería" de Gonzalo Ángel de Molina (1582), "Libro de la gineta de España" de Pedro Fernández de Andrade (1599), "Libro de ejercicios de la gineta" de Bernardo de Vargas Machuca (1600)

Dans le même temps la pratique du toreo à pied devient spectacle autonome selon les archives municipales de Séville. Les premiers et les plus anciens toreros à pied dont on ait des données documentaires proviennent dans leur immense majorité de l'abattoir sévillan. Ce sont les travailleurs du macelo (boucher).

C'est ainsi que naît la tauromachie à pied, ses techniques et ses figures. Dès lors, la course de taureaux, d’aristocratique qu’elle est, devient aussi populaire. Le principal acteur reste encore le cavalier, mais c’est désormais un varilarguero ("porteur de longue lance), ancêtre du picador actuel, qui devient le personnage principal. Au lieu de poursuivre le taureau, ou de se faire poursuivre par celui-ci, il l’attend de pied ferme pour l’arrêter avec sa lance, comme le font les picadors actuels. Après le varilarguero, les piétons se livrent aux mêmes jeux que du temps de la "corrida aristocratique". Ces "piétons" auront également pour rôle d’éloigner le taureau du cheval et se serviront pour ce faire de capes ou de manteaux, ancêtres du capote.

 

 

Apparition de la forme moderne

 

Dans les premières années du XVIIIème siècle, à Ronda, un certain Francisco Romero, à la fin d’une course, demande l’autorisation de tuer lui-même le taureau. Après l’avoir fait charger deux ou trois fois un leurre fait de toile, Francisco Romero estoque le taureau à l’aide de son épée. Par la suite, il recommence dans d’autres arènes et devient un véritable professionnel. Aussi Francisco Romero est-il généralement considéré comme "l’inventeur" de la corrida moderne, même s'il est possible que cette mise à mort du taureau par estocade ait été pratiquée avant lui. En 1726, Moratín écrit à ce sujet : "À cette époque-là, un homme commence à se faire remarquer : Francisco Romero, celui de Ronda, qui fut un des premiers à perfectionner cet art avec la muletilla, attendant le taureau face à face". Cet affrontement de face appelé estocade a recibir, que Romero pratique pieds joints, fera école.

Ses succès entraînent un changement radical dans l’art de toréer : avant lui, le personnage principal est encore le picador ; après lui, l’important n'est plus la mise à mort, mais ce qui la précède : elle n'est désormais plus que la fin du spectacle, non sa finalité.

À la suite de Francisco Romero, nombre de ses compatriotes se font aussi matadores de toros, notamment son petit-fils Pedro Romero, "Costillares" et "Pepe Hillo". Ce dernier publie à Cadix en 1786 La tauromaquia, o el arte de torear de pie y a caballo", premier traité de tauromachie moderne.

Mais c'est avec Francisco Montes "Paquiro" que se met en place l’organisation de tous les intervenants de la corrida. Dans un traité rédigé en 1836, La Tauromachie ou l'art de toréer dans les plazas à pied comme à cheval, il organise en effet le spectacle dont le premier règlement officiel sera promulgué en 1852. Désormais, picadors et banderilleros ne sont plus que les subalternes du matador ; leur but est de permettre la mise à mort du taureau avec le maximum de chances de réussite possible. Les suertes devenues dès lors inutiles, telles que les sauts à la perche, disparaissent.

Outre "Paquiro", les principales figuras ("vedettes") de cette époque sont "Cúchares", "Frascuelo" et "Lagartijo".

C'est avec l'arrivée de l'impératrice Eugénie, d'origine espagnole, qu'apparaissent en France, à partir des années 1852-1853, les premières corridas à partir desquelles la vogue de ce spectacle va se développer dans le pays, jusqu'à l'implantation d'arènes à Paris, à l'occasion de l'Exposition universelle de 1889.

 

Aux XXème siècle et XXIème siècles

 

Dans les années 1920, la corrida est devenue si populaire hors d'Espagne que l'on voit même des apprentis-toreros américains se présenter en Espagne sans grand succès, tandis que le français Pierre Boudin (Pierre Pouly) réussit à intéresser l'afición espagnole dès sa confirmation d'alternative le 8 mai 1922 à Madrid. Seul Sidney Franklin réussit à se faire un nom avec son entrée à la Maestranza en 1929. Par ailleurs la corrida espagnole est à la mode, les toreros des années 1920-1930 sont devenus des personnages recherchés par les intellectuels et les artistes. Ignacio Sánchez Mejías exerce un rôle important grâce à ses relations avec la génération surréaliste parmi laquelle figurent Federico García Lorca ainsi que Georges Bataille, Georges Braque et Max Jacob.

 

En raison du renom de barbarie que l'étripement du cheval valait justement à la nation et du fait de la difficulté d'approvisionnement en montures qui en résulte, Miguel Primo de Rivera impose en 1928 le caparaçon protecteur pour les chevaux, le peto. Dix modèles étaient alors en compétition. Présentés le 6 mars 1927 dans l'ancienne arène de Madrid, le modèle choisi par le dictateur fut celui présenté par Don Estebán Arteaga, les Espagnols considérant que le peto français accordait trop d'avantage au taureau. Composé de fer et de cuir, ce caparaçon était beaucoup plus lourd que celui actuellement utilisé (25 à 30 kg) et, s'il protégeait en effet le cheval, il pénalisait lourdement le taureau avec ses blindages qui formaient un véritable mur contre lequel l'animal de combat allait s'épuiser, jusqu'à l'amélioration du caparaçon, avec de nouveaux matériaux plus légers, employés par la suite.

La pénurie de taureaux entraînée par la Guerre d'Espagne et la Seconde Guerre mondiale amène dans l'arène des taureaux trop jeunes, dont le petit format et les cornes afeitées quasi-systématiquement permettent un toreo rapproché, où excelle Manolete.

La fin du XXème siècle voit une forte progression du nombre de corridas, encouragée par le tourisme, en même temps que s'accroît l'opposition à la corrida, freinée pour un temps par l'introduction du peto protecteur. Parmi les figures de ces dernières décennies, on compte les noms de "El Cordobés", "El Viti" et "Paco Camino". Puis viennent Francisco Rivera "Paquirri", Antonio Chenel "Antoñete", "Paco Ojeda" et Juan Antonio Ruiz Román "Espartaco". Au début du XXIème siècle, les principales figuras ("têtes d'affiche") sont "Enrique Ponce" et Julián López Escobar "El Juli".

En France, le ministère de la Culture inscrit en janvier 2011 la tauromachie à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel de la France, décision annoncée le 22 avril 2011. Le ministre de la culture Frédéric Mitterrand souligne que cette décision, en dépit de la démarche lancée en 2009 par l'union des villes taurines françaises et l'Observatoire national des cultures taurines, n'implique "aucune forme de protection, de promotion particulière ou de cautionnement moral et ne vise pas à proposer la tauromachie à l'inscription au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco", mais relève simplement "l'existence factuelle d'une pratique et d'un développement alentour d'un certain nombre d'éléments de nature culturelle (rituels, oeuvres inspirées, rassemblements populaires, pratiques d'un vocabulaire spécifique)".

Les opposants ont vivement critiqué cette décision par la voix de Claire Starozinski, présidente de l'Alliance anti-corrida. En revanche, le ministre a reçu le soutien de André Viard, président de l'Observatoire des cultures taurines, ainsi qu'une lettre de soutien signée par trente neuf personnalités du monde des arts et du spectacle parmi lesquelles : Éric Barbier, Christophe Barratier, Bartolomé Bennassar, Daniel Benoin, Vincent Bioulès, Sophie Calle, Philippe Caubère, Jean-Paul Chambas, Lucien Clergue, Florence Delay, Françoise Gilot, Gérard Jugnot, Claude Lanzmann, Christian Lacroix, Denis Podalydès, Michel Portal, Jean-Michel Ribes, Claude Viallat, Francis Wolff …


Le 3 avril 2013, le Tribunal administratif de Paris a rejeté au fond les demandes de diverses associations qui entendaient faire annuler l’inscription de la tauromachie à l'inventaire du patrimoine culturel français, considérant ainsi que cette inscription est d’une part parfaitement légitime et d’autre part qu’elle a été obtenue conformément aux usages en vigueur.

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